vendredi 7 février 2014

André Gide (1869-1951)


André Gide

(1869 - 1951)


Biographie d'André Gide :

Ecrivain français, issu d'une famille de la haute bourgeoisie protestante. Il s'affranchit de son éducation puritaine, dans les Nourritures terrestres, en 1897, en exprimant son goût pour la vie. Il subit à ses débuts l'influence des symbolistes et ses écrits de jeunesse restent sans succès. Il participe à la vie littéraire (L'Hermitage avec Paul Claudel, Henri Ghéon, Francis Jammes, Paul Valéry) et fonde la Nouvelle Revue Française (NRF) où il défend une école de la rigueur et du classicisme. En 1909, André Gide rompt avec Paul Claudel qui avait espéré le convertir au christianisme, mais vit une crise religieuse pendant la première guerre mondiale.

Dans "les caves du Vatican", roman burlesque publié à la veille de la guerre, André Gide expose sa théorie de l'acte gratuit, portée par son personnage célèbre, Lafcadio. En épigraphe, l'auteur a choisi une citation de Georges Palante: "Pour ma part, mon choix est fait, j'ai opté pour l'athéisme social". Il acquiert la notoriété après la guerre et a une grande influence sur de nombreux écrivains.

André Gide montre à la fois un désir de prendre parti dans les grands problèmes de son époque (contre le colonialisme, pour le pacifisme et le communisme…), tout en faisant preuve de méfiance pour toute forme d'engagement. Son enthousiasme pour le communisme s'éteint dans la douleur après son voyage en URSS qui l'amènera à dénoncer le stalinisme.

Bien qu'étant classique dans son style, André Gide rejette tout conformisme dans les idées. Sa personnalité est complexe, à la fois sensible et puritaine, tourmenté par le doute et l'inquiétude. Il refuse toute servitude familiale, sociale, religieuse pour mieux vivre dans l'instant et renaître chaque jour.
Il reçoit le prix Nobel de littérature en 1947.
Bibliographie : Le traité de Narcisse (1891), Paludes (1895), Les nourritures terrestres (1897), L'immoraliste (1902), Prétextes (1903), Saül (1903), La porte étroite (1909), Retour de l'enfant prodigue (1909), Les caves du Vatican (1914), La symphonie pastorale (1919), Si Le Grain ne meurt (1921), Corydon (1924), Les faux-monnayeurs (1925), Voyage au Congo (1927), Les Nouvelles Nourritures (1935), Retour de l'URSS (1936), Journal (1939-1946,1950), Correspondance (1948-1964), Ainsi soit-il ou Les Jeux sont faits (1952).
Liens:
      gidiana.net
      alalettre.com - André Gide
      Un monde à lire - André Gide



Citations d'André Gide :

"Les choses les plus belles sont celles que souffle la folie et qu'écrit la raison. Il faut demeurer entre les deux, tout près de la folie quand on rêve, tout près de la raison quand on écrit."
(André Gide / 1869-1951 / Journal 1889-1939 / septembre 1894)

"La prière, croyez-moi, n'est souvent pour beaucoup que le besoin, quand on se sent seul, de parler à la seconde personne."
(André Gide / 1869-1951 / Prétextes / 1903)

"Le catholicisme est inadmissible. Le protestantisme est intolérable. Et je me sens profondément chrétien."
(André Gide / 1869-1951 / Journal 1889-1939 / 10 février 1912)

"La cruauté, c'est le premier des attributs de Dieu."
(André Gide / 1869-1951 / Les Faux-Monnayeurs / 1925)

"Je ne puis me satisfaire du nihilisme absolu de Roger Martin du Gard. Je ne m'en écarte pas, ne le repousse pas, mais prétends passer outre, le traverser. C'est par-delà, que je veux reconstruire. Il me parait monstrueux que l'homme ait besoin de l'idée de Dieu pour se sentir d'aplomb sur terre ; qu'il soit forcé de consentir à des absurdités pour édifier quoi que ce soit de solide ; qu'il se reconnaisse incapable d'exiger de lui-même ce qu'obtenaient artificiellement de lui des convictions religieuses, de sorte qu'il laisse aller tout à néant sitôt qu'on dépeuple son ciel."
(André Gide / 1869-1951 / 1889-1939 / 20 octobre 1927)

"Je suis un incroyant. Je ne serai jamais un impie."
(André Gide / 1869-1951 / Journal 1889-1939 / 6 novembre 1927)

"La bonne foi est une vertu essentiellement laïque, qui remplace la foi tout court."
(André Gide / 1869-1951 / Journal 1889-1939 / 13 décembre 1927)

"Moins le blanc est intelligent, plus le noir lui parait bête."
(André Gide / 1869-1951 / Voyage au Congo / 1927)

"La sagesse commence où finit la crainte de Dieu. Il n'est pas un progrès de la pensée qui n'ait paru d'abord attentatoire, impie."
(André Gide / 1869-1951 / Journal 1889-1939 / 15 janvier 1929)

"La foi comporte un certain aveuglement où se complaît l'âme croyante; quand elle échappe aux entraves de la raison, il lui semble qu'elle bat son plein. Elle n'est que dévergondée."
(André Gide / 1869-1951 / Journal 1889-1939 / 7 avril 1929)

"Les persécutions ont toujours eu lieu (ou presque), jusqu'à présent, au nom d'une religion. Que la libre pensée à son tour persécute, la religion trouve cela monstrueux. Mais peut-on vraiment dire qu'il y ait persécution ? J'ai toujours quelque peine à accepter pour vrai ce qu'on a tout intérêt à nous faire croire."
(André Gide / 1869-1951 / Journal 1889-1939 / 1er juillet 1931)

"Ce jeune musulman, élève de Massignon, qui vint un matin me parler et que j'envoyai à Marcel de Coppet : avec des larmes, des sanglots dans la voix, il racontait sa conviction profonde : l'Islam seul était en possession de la vérité qui pouvait apporter la paix au monde, résoudre les problèmes sociaux, concilier les plus irréductibles antagonismes des nations... Berdiaeff réserve ce rôle à l'orthodoxie grecque. De même le catholique ou le juif, chacun à sa religion propre. C'est au nom de Dieu qu'on se battra. Et comment en serait-il autrement, du moment que chaque religion prétend au monopole de la vérité révélée ? Car il ne s'agit plus ici de morale ; mais bien de révélation. C'est ainsi que les religions, chacune prétendant unir tous les hommes, les divisent. Chacune prétend être la seule à posséder la Vérité. La raison est commune à tous les hommes, et s'oppose à la religion, aux religions."
(André Gide / 1869-1951 / Journal 1889-1939 / 14 avril 1933)

"Le Temps d'aujourd'hui publie une longue lettre signée C. J. Gabel (…) Comment ce correspondant ne se rend-il pas compte qu'en citant les paroles de Paul : "Que toute personne soit soumise aux autorités supérieures, car il n'y a point d'autorité qui ne vienne de Dieu. C'est pourquoi celui qui s'oppose à l'autorité résiste à l'ordre que Dieu a établi, etc.", comment ne se rend-il pas compte que Hitler ne parlerait pas autrement ?"
(André Gide / 1869-1951 / Journal, 1er septembre 1933)

"Les gens gagnent à être connus. Insister et développer cette formule riche en enseignements. (…) Le chrétien qui constaterait que, somme toute, et à se bien examiner, il "gagne à être connu" - et le "bon Dieu" qui, seul, y perd."
(André Gide / 1869-1951 / Journal 26 août 1934)

"C'est un vase informe [le mot Dieu] à parois indéfiniment extensibles, qui contient ce qu'il plait à chacun d'y mettre, mais qui ne contient que ce que chacun de nous y a mis."
(André Gide / 1869-1951 / Les Nouvelles Nourritures / 1935)

"Il est bien plus difficile qu'on ne croit de ne pas croire à Dieu."
(André Gide / 1869-1951 / Les Nouvelles Nourritures / 1935)

"Le christianisme, avant tout, console ; mais il y a des âmes naturellement heureuses et qui n'ont pas besoin d'être consolées. Alors, celles-ci, le christianisme commence par les rendre malheureuses, n'ayant sinon pas d'action sur elles."
(André Gide / 1869-1951 / Journal 1889-1939)

"Nombreux sont ceux qui confondent mysticisme et spiritualité, et qui croient que l'homme ne peut que ramper, si la religion ne le soulève; qui croient que seule la religion peut empêcher l'homme de ramper."
(André Gide / 1869-1951 / Journal 1889-1939)

"Ce qu'il y a de plus extraordinaire peut-être dans le besoin de l'extraordinaire, c'est que c'est, de tous les besoins de l'esprit, celui qu'on a le moins de peine à contenter."
(André Gide / 1869-1951 / Journal 1889-1939)

"Croyez ceux qui cherchent la vérité, doutez de ceux qui la trouvent."
(André Gide / 1869-1951 / Journal 1889-1939)

"Il est certaine façon d'adorer Dieu qui fait l'effet d'un blasphème. Il est certaine façon de nier Dieu qui rejoint l'adoration."
(André Gide / 1869-1951 / Journal 1889-1939)

"Les lois et les morales sont essentiellement éducatrices, et par cela même provisoire. Toute éducation bien entendue tend à pouvoir se passer d'elles. Toute éducation tend à se nier d'elle-même. Les lois et les morales sont pour l'état d'enfance : l'éducation est une émancipation. Une cité, un État parfaitement sage vivrait, jugerait sans lois, les normes étant dans l'esprit de son aréopage. L'homme sage vit sans morale, selon sa sagesse. Nous devons essayer d'arriver à l'immoralité supérieure."
(André Gide / 1869-1951 / Journal 1889-1939)

"Il est bon de laisser croire à l'enfant que Dieu le voit, car il doit agir comme sous le regard de Dieu et faire de cela sa conscience."
(André Gide / 1869-1951 / Journal 1939-1949 / 10 avril 1942)

"Ces idées dont on croit d'abord ne point pouvoir se passer. D'où grand danger d'installer son confort moral sur des idées fausses. Contrôlons, vérifions d'abord. Naguère le soleil tournait autour de la terre ; celle-ci, point fixe, demeurait le centre du monde, foyer d'attention du bon Dieu... Et puis non ! C'est la terre qui tourne. Mais alors, tout chavire ! Tout est perdu !... Pourtant rien n'est changé que la croyance. L'homme doit apprendre à s'en passer. De l'une, puis de l'autre, il se délivre. Se passer de la Providence : l'homme est sevré.
Nous n'en sommes pas là. Nous n'en sommes pas encore là. Cet état d'athéisme complet, il faut beaucoup de vertu pour y atteindre ; plus encore pour s'y maintenir. Le "croyant" n'y verra sans doute qu'invite à la licence. S'il en allait ainsi : vive Dieu ! Vive le sacré mensonge qui préserverait l'humanité de la faillite, du désastre. Mais l'homme ne peut-il apprendre à exiger de soi, par vertu, ce qu'il croit exigé par Dieu ? Il faudrait bien pourtant qu'il y parvienne ; que quelques-uns, du moins, d'abord ; faute de quoi la partie serait perdue. Elle ne sera gagnée, cette étrange partie que voici que nous jouons sur terre (sans le vouloir, sans le savoir, et souvent à coeur défendant), que si c'est à la vertu que l'idée de Dieu, en se retirant, cède la place ; que si c'est la vertu de l'homme, sa dignité, qui remplace et supplante Dieu. Dieu n'est plus qu'en vertu de l'homme. Et eritis sicut dei. (C'est ainsi que je veux comprendre cette vieille parole du Tentateur - lequel, ainsi que Dieu, n'a d'existence qu'en notre esprit - et voir dans cette offre, qu'on nous a dite fallacieuse, une possibilité de salut.)"

(André Gide / 1869-1951 / Journal 1889-1939 / 1947)

"La Foi soulève des montagnes ; oui : des montagnes d'absurdités. Je n'oppose pas à la Foi le doute ; mais l'affirmation : ce qui ne saurait être n'est pas."
(André Gide / 1869-1951 / Journal 1926-1950 / 1947)

"Se passer de Dieu... Je veux dire : se passer de l'idée de Dieu, de la croyance en une Providence attentive, tutélaire et rémunératrice..., n'y parvient pas qui veut."
(André Gide / 1869-1951 / Journal 1939-1949)

"L'athéisme seul peut pacifier le monde aujourd'hui."
(André Gide / 1869-1951 / Journal 1939-1949)

"J'admire toutes les formes de la sainteté (encore que certaines me soulèvent le cœur)."
(André Gide / 1869-1951 / Ainsi soit-il /1952)

"L'homme est responsable de Dieu."
(André Gide / 1869-1951 / Journal)



"On a beaucoup ri d'un télégramme que Mauriac a reçu peu de jours après la mort de Gide et ainsi rédigé : "Il n'y a pas d'enfer. Tu peux te dissiper. Préviens Claudel. Signé André Gide"
(Julien Green / 1900-1998 / Journal 28 février 1951)