Le plaisir de lire baisse chez les jeunes
de 15 ans
Les Français étaient 61 % à aimer lire en 2009 contre 70 % en 2000.
L'envie de lire est un prédicteur fort de réussite scolaire, toutes les études le démontrent, car la lecture reste nécessaire dans tous les domaines. La motivation est le point de départ : «Pour entrer dans cette tâche au départ abstraite et répétitive pour un enfant, il faut une certaine dose de motivation. Certains jeunes ne voient pas les enjeux de la lecture. Pour eux, c'est un outil purement scolaire et désagréable», explique Bruno Germain, de l'Observatoire national de la lecture. «Le plaisir, lui, ne se décrète pas. Il ne vient qu'avec la fluidité. On ne prend du plaisir que parce que c'est devenu facile de lire, on n'a plus d'efforts à faire. C'est une conséquence. Les enseignants emmènent régulièrement les enfants à la bibliothèque, les engagent à lire mais ils ont d'abord des objectifs plus scolaires, plus techniques. Le plaisir de lire dépend aussi des parents».
Une étude cantonnée au «papier»
Difficile de dire en dépit de cette étude si les élèves lisent moins. «Les jeunes lisent mais pas comme avant», expliquait le sociologue Bernard Lahire dans un récent article du CNRS, consacré à cette question. La «lecture scolaire» a en effet varié dans sa définition au cours de l'histoire. Aujourd'hui, il n'est plus possible d'apprendre seulement à «déchiffrer». Car il faut désormais comprendre ce qu'on lit, ce qui signifie savoir répondre, le plus souvent par écrit, à toutes sortes de questions sur les textes lus. Les exigences en matière de «savoir lire» sont donc variables selon les époques, affirmait-il. «Nul doute qu'à l'avenir, les nouvelles formes d'écrit sur écran produiront de nouvelles modalités du lire et de nouvelles définitions du “bien lire” ou de l'habileté à la lecture.» Il pointe aussi le fait que les enquêtes sur la lecture ne portent pas toujours sur la lecture sur Internet, grandissante chez les jeunes. Celle de l'OCDE s'est effectivement cantonnée à l'écrit «papier».«La lecture reste fondamentale pour réussir»
Trois questions à Sophie Vayssettes, analyste à la direction Éducation de l'OCDE.Pourquoi les élèves perdent-ils le goût de lire des livres ?
Le plaisir de lire s'est effondré partout dans le monde, sauf au Japon, entre 2000 et 2009. Il ne s'agit pas d'une question de pédagogie puisque cet effondrement est mondial. L'une des explications avancées, c'est que la lecture est concurrencée. Les jeunes passent de plus en plus de temps sur les réseaux sociaux, les jeux vidéo, etc. L'apparition des écrans ne date pas de 2000, mais l'offre de loisirs a beaucoup augmenté depuis ce temps. Le livre n'est plus le premier vecteur culturel. Il n'est qu'un média parmi d'autres.
L'envie de lire est-elle fondamentale pour réussir ?
L'envie de lire explique 18 % de la variation des performances scolaires dans l'enquête Pisa. Si on regarde la différence entre le quart des élèves qui dit apprécier lire et le quart qui n'apprécie pas, on compte un écart de trois années scolaires ! Le fait d'aimer lire et le fait d'obtenir de bonnes performances sont liés. La lecture reste fondamentale pour réussir, elle est partout nécessaire. Selon nos résultats, les grands lecteurs de fiction obtiennent les meilleurs résultats. Mais les élèves qui réussissent le mieux sont ceux qui utilisent différents types de lecture (BD, romans, journaux). Ceux qui ne sont focalisés que sur un seul type de lecture réussissent moins bien.
Va-t-on lire différemment à l'avenir ?
Il y a aujourd'hui tellement d'alternatives à la lecture pour découvrir et comprendre le monde qu'une baisse de la lecture classique n'est pas forcément étonnante. Cela dit, les jeunes ne lisent pas forcément moins mais différemment. Ils lisent peut-être moins les grands auteurs mais davantage de petits articles et informations, ce qui n'est pas toujours valorisé. C'est tout le paradoxe, la lecture est partout aujourd'hui, même sur les écrans, mais cette lecture numérique est différente.